Industries alimentaires emblématiques dans le Dauphiné

Ce texte a été réalisé par Jacques Droguet, membre de l’APHID

Anciennes industries

• Brasserie de la Frise – Devenue l’une des brasseries les plus importantes du Dauphiné avant la seconde guerre mondiale, cette brasserie fut créée par Jean-Baptiste Brun dans les années 1830 à Grenoble. En 1883, l’établissement prend le nom de Brasserie Brun Père & Fils et s’installe au lieu dit « La Frise » à Fontaine qui deviendra grenoblois en 1862. En 1891, la famille Brun vend son fonds de commerce à un groupe d’hommes d’affaires grenoblois. La production s’arrête en 1957. [C’est actuellement le quartier d’affaires Europole qui est installé en partie sur l’ancien site de production]
• Pâtes Lustucru – En 1871, Louis Cartier-Million rachète une petite usine de pâtes alimentaires à Grenoble. En 1921, Albert Cartier-Million prends la tête de l’entreprise et en impulse son élan. Pendant ce temps, son frère Félix Cartier-Million reprend la chocolaterie grenobloise du Dauphin (rachetée par Aimé Bouchayer en 1917) et crée la marque de chocolat Cémoi.
• Chocolat Cémoi – Aimé Bouchayer aménage une chocolaterie moderne qu’il délocalise rue Ampère à Grenoble. En proie à des difficultés financières, celui-ci vend son entreprise à Félix Cartier-Million en 1922 qui prends alors le nom de Cémoi laquelle ferme en 1976.
• Biscuits Brun – Pierre-Jean-Félix Brun ouvre une petite biscuiterie artisanale à Grenoble en 1885. Il se spécialise rapidement dans la production de biscuits pour soldat, misant sur la clientèle de l’armée très présente dans cette ville de garnison. La demande explose pendant la Première Guerre mondiale. En 1915, Gaétan Brun, qui a succédé à son père, fait construire une nouvelle usine à Saint-Martin-d’Hères et industrialise sa production. Ses successeurs modernisent sans cesse leur outil de production. En 1968, l’entreprise fusionne avec la biscuiterie Lu mais ferme néanmoins en 1989.

Industries actuelles – Classement par thèmes

Transformation de lait

• Bleu du Vercors-Sassenage – Le Bleu de Sassenage, du nom des seigneurs locaux, est apparu au XIVe siècle dans le massif du Vercors.
• Fromage Saint-Marcellin – On trouve les premières mentions de ce fromage au XVe siècle dans les livres de compte de l’Intendant du roi Louis XI ! Fabriqué pendant des siècles dans les fermes pour la consommation locale, ce fromage conquiert de nouveaux marchés à la fin du XIXe siècle.
• Fromagerie de l’Étoile du Vercors créé par Marius Berruyer en 1942 (Saint-Just-de-Claix) – Fromages traditionnels à base de lait cru
• Lait Candia (Vienne) – Depuis 1965
• Danone – Lait, beurre, fromage, autres produits laitiers (Créée en 1970 sur le site lyonnais de Pierre-Bénite, la marque Danette a été transférée en 1986 à Saint-Just-Chaleyssin)

Boissons

• Liqueurs de la Grande-Chartreuse [Chartreuse Verte – Chartreuse Jaune] – Un manuscrit d’origine inconnue est remis à l’ordre des chartreux au début du 17^ème siècle contenant une formule d’un « élixir de longue vie ». Le frère Jérôme Maubec en fixe définitivement la recette en 1737. D’abord fabriqué à Voiron, la distillerie déménage à Aiguenoire près d’Entre-deux-Guiers en 2018.
• Distillerie Cherry-Rocher – Fondée par Barthélémy Rocher en 1705 à La Côte-Saint-André [La première en France !]. Son fondateur imagine une macération de cerises dans de l’alcool et de sucrer le mélange qui prend alors la dénomination de Guignolet. Cette société fusionne avec la distillerie Neyret-Chavin en 1960 puis avec la distillerie de l’Hermitage en 1986 [Produit phare : Arquebuse de l’Hermitage (Créée en 1857 par le frère mariste Emmanuel)] et s’établit à Ruy-Montceau près de Bourgoin-Jallieu [Liqueurs, apéritifs, crèmes de fruits, sirops et coktails]
• Distillerie Neyret-Chavin – Créée en 1727 (Bourgoin-Jallieu) – Les distilleries Neyret et Arnaud émergent simultanément et fusionnent vers 1830 pour donner la distillerie Neyret-Arnaud ; celle-ci englobe à leur tour la distillerie Chavin qui rejoint à son tour Cherry-Rocher.
• Sirops Teisseire – Mathieu Teisseire était vinaigrier. En 1720, en mélangeant des cerises, de l’eau de vie, de la cannelle et du sucre, il concocte une liqueur sous le nom de Ratafia. Il signe ainsi les débuts de l’entreprise Teisseire qui porte encore son nom trois siècles plus tard. Cette liqueur, très appréciée, fait la renommée de Grenoble. Le liquoriste Peyraud et Ferrouillat en devint le successeur, racheté ensuite par la famille Reynaud en 1907 qui développe une spécialisation dans le sirop de fruits. Cette société opère une véritable révolution dans le conditionnement de leur produit dans un bidon métallique léger et incassable en 1959.
• Distillerie Meunier – Créée en 1809 par Charles Meunier à Voiron [Produit phare : Génépi des Alpes (Saint-Quentin-sur-Isère)]
• Apéritif Bonal [l’Authentique Gentiane] – Créé en 1865 par Hippolyte Bonal à Saint-Laurent-du-Pont, ancien moine chartreux, racheté ensuite par la Maison Dolin (Chambéry)
• Bigallet – Créé en 1872 par Félix Bigallet et son frère Louis à Lyon puis s’implante en Isère en 1885 (Val-de-Virieu) – Fabrique de sirops, spécialités alcoolisées, crèmes et liqueurs. La Citronade est le premier sirop élaboré dans la tradition de la maison avec du sucre de canne et des extraits naturels de zestes de citron frais.
• Antésite (Voiron) – Fondé par Noël Perrot-Berton (Apothicaire) en 1898 – L’Antésite est une boisson originale à base de réglisse, réalisée par infusion et macération, sans alcool. Cette boisson, très désaltérante, très concentrée, permet d’aromatiser l’eau par faible dilution.
• Distillerie Eyguebelle (Valaurie – Drôme) [Sirops, liqueurs de plantes et de fruits] En 1889, la distillerie « Aiguebelle » sort pour la première fois ses liqueurs dans le commerce. Elles portent le nom de l’abbaye cistercienne presque millénaire [1137] où elles sont élaborées. En 1996, les moines cèdent leurs activités à condition que le repreneur change leur désignation ; on passe alors d’Aiguebelle à Eyguebelle !
• Abbaye Notre-Dame d’Aiguebelle (Drôme) – Alexion, boisson fortifiante et reconstituante sans alcool à base de plantes.
• Maison J. Colombier (Villette-de-Vienne) – Eau de vie de poire William’s depuis 1930 avec un client célèbre : Fernand Point restaurateur de « La Pyramide » à Vienne.
• Distillerie Ambix (Vizille) – Cette distillerie nouvellement créée (2012) utilise trois alambics centenaires alimentés au feu de bois et à feu vif. Produit phare : l’Elixir du Roy dont la recette remonte au XVIIIe siècle.

Produits à base de céréales

• Maison Saint Jean [Ravioles – Quenelles – Pâtes (Saint-Just-de-Claix – Saint-Jean-en-Royans – Bourg-de-Péage – Romans-sur-Isère)] – Pastier français depuis 1935
• Biscuiterie Louvat (Saint-Geoire-en-Valdaine) – Fondé en 1954 par Maurice Louvat
• Fabrication de biscuits par les moniales du monastère Notre-Dame de Chalais [Fondé au début du XIIe siècle (au-dessus de Voreppe)] depuis 1966
• Brioches Pasquier (Charencieu) – Fondé par les frères Pasquier en 1974 dans un petit village de Maine-et-Loire puis installation dans l’Isère
• La Raviole du Dauphin [Maison Rambert – (Chatte)] – Fondé en 1987

Chocolateries

• Chocolat Bonnat (Voiron) – Fondé en 1884 par Félix Bonnat
• Chocolaterie de Marlieu (Chimilin) – Fondé en 1906 par Amédée Arnaud des Essarts
• Chocolat Valrhona (Tain-l’Hermitage) – Fondé par Albéric Guironnet (Pâtissier) en 1922
• Chocolat Norbert Meunier [Maître Artisan Chocolatier – Grenoble]

Industries de « bouche »

• Maison Martin-Volailles (Saint-Sauveur) – Créée en 1961 par Sébastien Martin
• Pierre Martinet-Saladerie – Créée en 1968 dans l’Ain et installation à Saint-Quentin-Fallavier en 1980
• Jambon Aoste (Aoste – Isère) [N°1 du Jambon cru en France] – Roger Reybier découvre à Parme (Italie) le jambon qu’il veut introduire en France. Il lance sa première unité de production en 1976. L’usine fabrique aussi saucissons et autres salaisons sèches.
• Plats cuisinés Pierre Clot – Charcutier traiteur depuis 1957, Pierre Clot commence son activité à Grenoble en 1970 [plaques de Pizza]. Nouveau magasin en 1981 puis construction d’un nouvel atelier en 1986 pour l’élaboration de tartes salées, croque-monsieur, croissants au jambon, roulés au fromage, feuilletés, aspics, plats cuisinés etc. En 1990, son fils José Clot développe une nouvelle unité de fabrication face à la demande croissante de la grande distribution et de la restauration collective. En 2013, la société Alpes Frais Production/Pierre Clot rejoint le groupe PME Valentin Traiteur dont le siège se trouve à Mably (Loire).
• Groupe Valentin Traiteur (Rives) – En 1996, Valentin Traiteur était un acteur régional. Il regroupe aujourd’hui les marques Pierre Clot et Private Label MDD (Marque de Distributeur). Cette dernière est une marque commerciale destinée à un produit dont les caractéristiques ont été définies par l’entreprise ou le groupe d’entreprises qui en assure la vente au détail. Le groupe Valentin Traiteur, depuis 2021, poursuit sa croissance avec un investissement conséquent sur le site de Rives où Alpes Frais Production/Pierre Clot a emménagé après avoir quitté le site de Voreppe.

Autres

• Champignonnière de la Frise (Eybens) installée dans les anciennes caves de la brasserie de la Frise (2016) – Site idéal naturellement froid et naturellement humide pour la production de champignons, qui se développent en utilisant des substrats de paille et de sciure.
• Cave coopérative de Bernin – Vins de Pays du Grésivaudan
• La Noix de Grenoble -– Les vergers de la noix de Grenoble sont principalement situés de part et d’autre de la vallée de l’isère – Confrérie de la Noix de Grenoble (Chatte)
• Domaine des Hautes Glaces (Cornillon-en-Trièves) – Whisky paysan et biologique
• Distillerie des 4 Vallées [Chamaloc (Drôme)] – Confiture, Miel, Sirop de lavande

Sites emblématiques & Reconversion

• Ancienne minoterie Armand (Quartier Berriat – Grenoble)
• Ancienne distillerie Bonal à Saint-Laurent-du-Pont
• Ancienne chocolaterie d’Aiguebelle – Donzère (Drôme)
• Chocolats Cémoi (Grenoble)
• Biscuits Brun (Saint-Martin-d’Hères)
• Les Grands Moulins de Villancourt (Le Pont-de-Claix)
• Le Marché d’Intérêt National de Grenoble : une halle en voile de béton armé labellisée « Architecture contemporaine remarquable »

Sites à visiter & Publicité

• Séchoir à noix de Cognin-les-Gorges – Construit au XVIIIe siècle
• Musée du Grand Séchoir – Maison du pays de la Noix (Vinay)
• Musée des Liqueurs Cherry-Rocher (La Côte-Saint-André)
• Musée du Paradis du Chocolat [Maison Jouvenal installé depuis 1912 (La Côte-Saint-André) – Ouverture du musée en 2022
• La Cité du Chocolat (Tain-l’Hermitage)
• Musée de la Clairette de Die (Vercheny – Drôme)
• Palais des Bonbons, du Nougat et des Souvenirs à Montélimar (Drôme) – Fabrique artisanale du nougat sous les yeux des visiteurs.
• Maison de la Truffe et du Tricastin à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme)
• Les affiches publicitaires [Les « Réclames »] – Andry-Farcy – Tancrède Synave

Divers

• Tonnellerie Bouyoud (Saint-Sauveur)
• La distribution des boissons (et des sirops Teisseire notamment conditionnés en bouteilles) se fait par l’intermédiaire de deux circuits de distribution :
• Café-Hôtel-Restaurant [CHR]
• Grande et Moyenne Surface [GMS]
• Grande distribution alimentaire : Genty-Cathiard

Addendum

• Les aliments sont classés en trois catégories principales :
  • Protides : Produits carnés – Poissons – Œufs – Lait et produits laitiers [Beurre, fromages, crèmes glacées]
  • Lipides : Graisses d’oie, de bœuf ou de mouton – Lard – Matières grasses végétales [Huiles de tournesol, d’arachide, de soja, de colza, de noix, d’amande]
  • Glucides : Fruits – Blé [Pain – Pâtes] – Riz – Chocolat
• les légumes
  • Légumes non amylacés : salade verte, épinards, tomates, navets, courgettes, chou-fleur, artichauts, asperges, aubergines, champignons, etc.
  • Légumes amylacés : Pommes de terre – Maïs – Betterave

• La noix, sous ses différentes formes, cerneaux ou huile possède des propriétés nutritionnelles reconnues, et aide en particulier à prévenir les maladies cardiovasculaires voire contribue à un rôle protecteur contre certains cancers ; conclusion d’un long travail scientifique réalisé dans le laboratoire de chimie analytique et de bromatologie du Professeur Josette Alary de l’Unité de Formation et de Recherche de pharmacie de Grenoble (1997).
• Les additifs alimentaires
  Les additifs sont des substances qui sont ajoutées aux aliments dans un but technologique : améliorer leur conservation, réduire les phénomènes d’oxydation, colorer les denrées, renforcer leur goût, etc. Leur emploi est donc réglementé et leur présence doit obligatoirement être mentionnée sur les étiquettes des produits concernés.
  Il existe différentes catégories d’additifs, les cinq principales sont :
  • Les colorants qui permettent de rendre aux aliments leur coloration, de la renforcer ou de leur conférer une coloration
  • Les édulcorants qui donnent une saveur sucrée ; les édulcorants sont utilisés pour remplacer le saccharose
  • Les conservateurs qui aident à la conservation en bloquant la présence et le développement de micro-organismes indésirables (Exemple des moisissures ou des bactéries responsables de toxi-infections alimentaires)
  • Les antioxydants qui permettent d’éviter ou de réduire les phénomènes d’oxydation provoquant, entre autres, le rancissement des matières grasses ou le brunissement des fruits ou légumes coupés
  • Les agents de texture (émulsifiants, stabilisants, épaississants, gélifiants) qui améliorent la présentation ou la tenue du produit et les exhausteurs de goût, qui sans avoir de saveur propre prononcée, ne modifie pas le goût du produit, mais en augmente l’intensité de sa perception olfato-gustative
• Origine des noms de marque & des logos
  • Pâtes Lustucru– deux hypothèses à l’origine de ce terme :
    • Les publicitaires du fabricant se sont inspirés d’un personnage de la chanson « C’est la mère Michel qui a perdu son chat… » où il est question d’un certain Père Lustucru!
    • C’est la contraction de l’expression « L’eusses-tu cru [Plus-Que-Parfait du Subjonctif à la forme interrogative du verbe être] » qui correspond au thème de la publicité : L’eusses-tu cru que les pâtes Lustucru sont faites avec des œufs frais !
      Par ailleurs, c’est en 1911, à l’issue d’un concours d’affiches publicitaires lancé par Albert Cartier-Million (un des trois fils de la famille) et afin de prôner la marque familiale, les couleurs du logo sont dévoilées : un damier bleu clair et bleu foncé, proposé par le dessinateur Synave.

• • Chocolat Cémoi – deux hypothèses à l’origine de ce terme :
    • Albert Cartier-Million succède à son père Louis Cartier-Million à la tête des pâtes Lustucru. Son frère Félix Cartier-Million (fils de Louis) rachète une chocolaterie en difficulté pour la relancer et aurait dit à son frère : les pâtes, c’est toi, le chocolat c’est moi !
    • Félix Cartier-Million décide de rebaptiser la chocolaterie Dauphin acquise à Aimé Bouchayer sous le nom de Marquise ! Qui a trouvé ce nom stupide interroge son épouse ? C’est moi répond-il. Le nom est resté.

Document préparé par Jacques Droguet, septembre 2022