Association pour le Patrimoine et l'Histoire de l'Industrie en Dauphiné

Metafram-Sintertech à Pont-de-Claix, sa généalogie à découvrir

Conférence de Colette Allibert, Directrice de Recherche honoraire au CNRS, ancienne Présidente de l’Aphid
lundi 3 avril 2023

Résumé de la Conférence

La conférence a débuté par quelques rappels sur la métallurgie des poudres et une brève histoire de cette dernière. Cette technique de production de pièces métalliques, à partir de poudres qui ne sont pas (ou pas totalement) fondues est utilisée pour de nombreux objets du quotidien : les matériaux à base de métaux à haut point de fusion comme le tungstène (filaments de lampes, écrans anti-rayons X…) matériaux durs (outils de coupe en WC-Co), pièces composites dont l’homogénéité ne peut être obtenue que par cette technique ( contacts électriques,  outils diamantés, coussinets  poreux autolubrifiants), pièces texturées (aimants permanents)…

Colette Allibert prépare actuellement la publication d’un ouvrage sur l’histoire de Metafram et de 8 autres entreprises de métallurgie des poudres en Rhône-Alpes.

Entreprises MdP Rhône-Alpes (Source C.Allibert)

Histoire de Metafram

L’origine

Metafram s’installe à Pont-de-Claix en 1949, sur le terrain et dans les locaux des anciens « Ateliers de chargement » (des obus de 1914-1918) maintenus en bon état par les militaires. Le prix est bas, et l’hydrogène provenant de la fabrication toute proche du chlore y est disponible en abondance et à faible coût. On ne trouve cependant aucun document dans les archives. Metafram, c’est qui ? Après 1918, Progil, Bouchayer et d’autres notamment Schneider (fabrication de canons), qui avaient participé à l’effort de guerre, avaient aussi accumulé des bénéfices. Schneider est à l’origine de la création de l’Union Européenne Industrielle et Financière (UEIF) en 1920. UEIF avait racheté différentes industries austro-hongroises dont Skoda (canons…), pour opérer ensuite une évolution : ferroviaire pour Schneider ; canons pour Skoda. Après une période difficile entre 1939 et 1945, avec en particulier le sabotage des ateliers du Creusot décidé par Charles Schneider, la Société se réorganises sous forme de holding, avec notamment un développement vers le nucléaire et… la métallurgie des poudres. C’est ainsi que UEIF fonde Metafram à Paris en 1948, achète des licences de MdP à Usqvarna et crée le site de Pont-de-Claix. L’achat est sans doute facilité par les liens entre Schneider et le ministère de la Défense. L’usine débute sa production en 1950. Au même moment, un département poudres est créé à Grenoble par Ugine-Carbone. Les deux entreprises signent des accords de non-recrutement de personnel. Deux ans auparavant, en 1948, une startup française nommée « La Métallurgie Française » (MDPF) est créé avec le soutien du groupe Höganas, et installeses ateliers à Beauchamp (Val d’Oise). Cette entreprise sera finalement absorbée par Metafram en 1957.

L’évolution

En 1960, au décès de Charles Schneider, Empain prend sa succession et réorganise la holding. Le groupe se retire partiellement de Metafram, qui continue cependant son activité, notamment avec un contrat d’enrichissement d’Uranium avec le CEA, dans lequel elle se retrouve à nouveau dans une concurrence stimulante avec Ugine-Carbone.

En 1971, la fusion Péchiney-Ugine-Kuhlmann conduit à la présence dans le groupe de 3 filiales, Ugine-Carbone, Metafram et Cime Bocuze, concurrentes, multi productions et qui n’interagissent pas. Après un état des lieux (et un changement à la tête de Metrfram), une réorganisation conduit à un partage des activités : pièces mécaniques pour Metafram, carbures et poudres pour Ugine-Carbone et pseudo-alliages tungstène pour Cime Bocuze. De 1971 à 1981, la décennie PUK verra la construction en 1971 de l’usine de Veurey et 10 années de négociation avec UEIF qui se retirera en 1981. 1981 voit également la fracture de PUK et la redistribution de la métallurgie entre Péchiney et Usinor.

Après la fusion en 1982 entre Alliages Frittés et Metafram, la fusion en 1991 avec Oloron-Frittage conduit à la création de Sintertech, filiale Péchiney et Usinor qui est ensuite vendue à un équipementier britannique, avec comme conséquence une réduction d’effectifs. La société Metafram est revendue à l’équipementier américain Federal-Mogul en 1998, puis reprise en 2013 par le groupe TM France (Thierry Morin). La liquidation judiciaire de Metafram est prononcée en 2019. Une partie de l’activité a redémarré avec la création en 2019 de la société PORAL SAS, avec deux sites de production : Pont-de-Claix (filtres et pièces autolubrifiantes) et Oloron-Sainte-Marie (pièces mécaniques).

Conférence Aphid du 4 avril 2023

Questions/Réponses

  • Quel est le lien entre Metafram et Ugimag ? Il n’y a pas de lien.
  • Comment Fabrique-t-on les poudres ? Il y a différentes sortes de poudres métalliques et des procédés de fabrication très différents conduisant à des poudres de taille très différente (de la poudre nanométrique à la poudre de 100 ou 200µm). Cela peut être une obtention directe (poudre de tungstène issue d’oxyde), le résultat d’un broyage, l’atomisation (solidification de gouttelettes, comme pour les aciers) …
  • Questions pour ceux qui ont travaillé dans l’entreprise Metafram (6 anciens de l’entreprises sont présents dans la salle)
    • L’ambiance ? C’est l’inquiétude lors des multiples restructurations qui était difficile, sinon « tout allait bien »
    • L’activité était-elle polluante ? L’activité en elle-même ne l’était pas. Des matériaux comme Ni donnaient lieu à des précautions particulières
  • Les connaissances anciennes dans le domaine des céramiques ont-elles été utiles pour la MdP ? Effectivement, il y a beaucoup de points communs
  • Quid de la fabrication additive ? On distingue deux grandes familles de techniques : celle dans lesquelles la poudre est fondue (laser, faisceau d’électron) et celles dans lesquelles la mise en forme des pièces par une technique additive conduit à une pièce « crue » qui doit être ensuite (déliantée et) frittée. Cette deuxième famille met en jeu, dans sa deuxième étape, les mêmes processus et le mêmes savoir-faire que la MdP « traditionnelle »

 

Compte rendu rédigé par Jean-Marc Chaix