Association pour le Patrimoine et l'Histoire de l'Industrie en Dauphiné

La naissance de l’électricité, résultant de la domestication de la puissance des torrents

présentée par Jacques Julliard, vice-président d’A3E, membre de l’Aphid

 

Compte rendu 

rédigé par Anne Laffont

Jacques Julliard, conférence Aphid 2025

Cette conférence s’inscrit dans le cadre de la célébration du centenaire de l’exposition de la Houille Blanche et du Tourisme 1925-2025

 

Puissance des torrents

En 1859 il y avait eu jusqu’à 1,50 m d’eau dans les rues de Grenoble (c’était avant la construction de barrages). Des lits de torrent mal entretenus peuvent causer des inondations.

De cette puissance on peut tirer une énergie renouvelable et pilotable. Ce furent d’abord des moulins à eau, dérivés des norias du Proche-Orient apparus 2000 ans avant notre ère.

La première centrale hydroélectrique (Vulcan Street Plant) est construite dans le Wisconsin en 1882.

L’électricité

Thalès de Milet (600 ans avant notre ère) l’a découverte en frottant un morceau d’ambre (électricité statique). Nombreux sont les savants qui font partie de l’histoire de l’électricité : parmi eux (fin 17e, 18e siècle) James Watt, Alessandro Volta, André-Marie Ampère, Georg Ohm, James Clerk Maxwell (la règle des 3 doigts I B F) , Edison (l’ampoule électrique en 1879), Nikola Tesla.

Nikola Tesla a mis au point l’alternateur, permettant le transport et la distribution d’un courant alternatif.

Dans une ampoule à filament 85% de l’énergie sert à chauffer le filament et 15% à éclairer.

Qu’est-ce que le courant électrique ?

La matière est composée de molécules, d’atomes eux-mêmes constitués d’un noyau (protons et neutrons) et d’électrons qui gravitent autour du noyau. Ce sont les électrons (chargés négativement) qui se déplacent dans le conducteur (échange d’électrons entre atomes du conducteur) et créent ainsi un courant électrique quand une tension est appliquée aux extrémités du conducteur.

Les centrales hydroélectriques

Benoit Fourneyron a inventé la turbine hydraulique (1832) ainsi que les conduites forcées. Aristide Bergès est le premier à avoir utilisé une chute d’eau et une turbine pour faire fonctionner ses défibreurs à Lancey (1869). Joseph Bouchayer et Félix Viallet s’associent et se lancent dans la fabrication de conduites forcées (1870). Charles Albert Keller construit la remarquable centrale des Vernes à Livet-Gavet (1918), classée au titre des monuments historiques.

Les turbines portent le nom de leur inventeur, Francis et Pelton sont américains, Kaplan est autrichien.

A l’origine la distribution était en 110V, mais ne permettait pas de véhiculer de la puissance. En 1956 la tension est passée à 220V. La fréquence du courant alternatif a été uniformisée à 50 Hz sous l’impulsion de l’allemand AEG.

Les conduites forcées et les barrages

Les premières installées en Suède sont en bois avec cerclage en métal, mais présentent des fuites. Les conduites métalliques sont composées de modules rivetés en atelier qui sont ensuite assemblés sur place.

Cette aventure doit être remise dans le contexte de l’époque, avec des moyens rustiques, et des règles qui n’étaient pas aussi rigoureuses qu’elles le sont actuellement. Il a fallu parfois déplacer des populations (ce fut le cas pour le barrage du Chambon et celui de Tignes).

Développement des écoles et universités

  • 1836 : Lycée technique Vausanson
  • 1898 : Institut électrotechnique de Grenoble (1913 : Institut Polytechnique de Grenoble)
  • 1929 : Ecole Merlin Gerin dédiée à la formation des apprentis

Production d’électricité

En France la répartition est : nucléaire 67%, hydraulique 13.9%, thermique fossile 3.5%, éolien (terre et mer) 8.7%, solaire 4,8%, autres renouvelables 2%. (données EDF 2024)

La région Auvergne-Rhône-Alpes totalise 45% de l’hydraulique français.

Le barrage de Grand’Maison (9% du parc hydraulique EDF) est un STEP (station de transfert d’énergie par pompage) à l’origine pour stocker l’excédent de la centrale nucléaire de Creys-Malville.

Le moteur électrique a révolutionné l’industrie.

Jusqu’à l’arrivée du moteur électrique les machines sont mues par l’énergie hydraulique. La scie hydraulique à grumes (musée des hautes Alpes) en est un exemple. L’atelier de tissage de Morestel est parcouru par des arbres de transmission qui sont un danger pour le personnel et il y a eu de nombreux accidents. Dès 1888 le moteur électrique à induction alimenté en courant alternatif a permis de changer la vie industrielle.

Les industries se développent

La conférence est illustrée par la fabrication de carbure de calcium dans un four électrique pour fournir l’acétylène (gaz d’éclairage) à Livet-et-Gavet, des papeteries à Pont-de-Claix, la tannerie Raberin à Varces-Allières, les forges et hauts fourneaux à Allevard, la fabrication de la viscose à Echirolles, la cimenterie Vicat à Genevrey de Vif.

L’exposition universelle de la houille blanche et du tourisme de 1925

Elle a été initiée par le maire de Grenoble (Paul Mistral) en 1923. Il avait choisi un site qui appartenait à l’armée (aujourd’hui parc Paul Mistral) et les pourparlers entre la mairie et l’armée n’ont pas été faciles. Les travaux ont pu commencer début 1924.

Dernier vestige de l’exposition, la tour Perret fait actuellement l’objet de travaux de restauration. Ses fondations sont renforcées par des pieux (elle s’incline, étant sur une zone alluvionnaire). L’ascenseur est refait à l’identique (fabrication suisse).

La fée électricité Oeuvre de R Dufy - MAM Paris

L’exposé était introduit par un tableau de Gaston Buissière, « la houille blanche » 1902, et se conclut avec « la fée électricité » de Raoul Dufy, une commande pour l’exposition internationale de Paris de 1937, œuvre monumentale de 10m de haut et 60m de long actuellement exposée au Musée d’Art Moderne de Paris (https://www.mam.paris.fr/fr/oeuvre/la-fee-electricite).

Questions/Réponses

  • Jacques Julliard, vice-président de l’A3E (Association des Encyclopédies de l’Environnement et de l’Énergie – https://www.a3e.fr) a présenté par ailleurs 2 autres conférences : « L’eau et la vie » et « Le cycle de l’eau qui déraille »
  • Que dire de la désindustrialisation ? Les industriels s’étaient positionnés près des cours d’eau pour profiter de l’énergie hydraulique. Le transport de l’électricité a permis d’éloigner les sites de production. Au début on ne pouvait pas transporter le courant trop loin à cause de limitation technologique sur la tension des lignes haute tension.
  • Courant continu ou courant alternatif ? Sur les longues distances (> 500km) le transport en courant continu est plus stable. C’est le cas au Zaïre, en Chine (transport sur 3400 km).